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Workplace Experience Manager, ou la contribution nette au bonheur de l’entreprise

Un échange avec Alham Souimdi, Workplace Experience Manager chez Ledger, qui a auparavant fait ses armes et prouvé son expertise chez Criteo, pendant 8 ans.

Il est important de reconnaître qu’un collaborateur heureux est un collaborateur productif ! En France, on a l’approche inverse : on est d’accord pour s’intéresser au bonheur des salariés si on a une preuve que cela aura un impact sur la performance. On cherche à tout mesurer, objectiver, quantifier : mais c’est difficile de mettre des chiffres précis sur ces éléments !

D’où vient l’importance de la qualité de vie au travail (QVT)?

L’importance de la QVT vient initialement des entreprises IT de la Silicon Valley, dans lesquelles il est monnaie courante d’être en jean et t-shirt, de faire une pause sieste, de travailler pieds nus, etc. Certaines de ces entreprises (Facebook, Twitter, Google …) sont venues s’installer en France, et la qualité de vie dans ces entreprises a attiré les talents : les autres entreprises n’ont pas d’autre choix que de s’aligner et de suivre ces pratiques si elles veulent, elles aussi, attirer ces talents.

Les entreprises leaders / initiatrices sur la QVT sont devenues des références pour les entreprises classiques, qui doivent s’inspirer voire se faire coacher par ces nouvelles entreprises, si elles veulent rester dans le jeu du recrutement. Par exemple, la BNP avait organisé un groupe de travail dans lequel je suis intervenue, en tant que Workplace Experience manager de Criteo, afin de partager mes best practices.

Une autre évolution est intéressante à observer, celle du classement des Great Place to Work : au démarrage, lorsque le fondateur a démarché ses premiers prospects, ces derniers lui ont ri au nez, en disant que ça n’avait aucun intérêt. Aujourd’hui, apparaître dans ce classement est clef, et contribue fortement à l’image de marque employeur.

Chez Ledger, la concurrence est rude pour recruter de nouveaux talents : avoir investi dans de super bureaux, au coeur de Paris, avec différents espaces, différentes atmosphère, en y proposant du snacking, des salles de sieste, peut clairement faire la différence. Une des dernières recrues, qui avait le choix du roi, et des offres alléchantes, a choisi Ledger notamment pour la qualité de l’espace de travail : comme quoi, on peut dire que  le Workplace Experience est un réel investissement avec un ROI positif !

En quoi consiste le rôle de Workplace Experience manager?

Déjà, il faut savoir que le Workplace Experience, ce n’est pas que les services généraux ! Aujourd’hui, quand on parle de services généraux, on voit des services poussiéreux, qui n’apportent que peu de valeur à l’entreprise, si ce n’est assurer que la machine à café fonctionne toujours. Etre Workplace Experience Manager, c’est assurer ce niveau de maintenance, mais ce n’est que la couche de base ! Les couches suivantes comprennent notamment, mais pas seulement : la sélection d’une belle adresse, un bureau atypique, l’aménagement « like home ».

Il est important de réfléchir à l’aménagement, afin que le salarié se sente comme chez lui, ou presque : un salarié qui se sent bien dans son cadre de travail ne pensera pas toute la journée à l’heure à laquelle il doit partir – au contraire, il pourra même rester plus tard, sans pour autant demander son dû pour des heures supplémentaires. Par ailleurs, il faut penser à différents espaces, qui permettent différents modes de travail : réunion de brainstorming, réunion informelle, réunion formelle sur les objectifs, etc. Le Workplace Experience possède de multiples facettes !

Enfin, parlons de l’organisation des afterworks : chez Ledger, comme chez Criteo, des Happy Hours sont organisés régulièrement, de 18h à 20h30. Ce sont des afterworks où les salariés se détendent, certes, mais continuent surtout de parler business ! Des heures supplémentaires, avec le sourire !

Peut-on mesurer un ROI de ce type d’investissement?

Souvent, il est vrai que les décisionnaires voient d’abord les dépenses de bien-être comme des coûts, sans y voir le retour sur investissement; on ne peut pas mettre de chiffre sur les bénéfices et l’augmentation de la performance, mais on peut clairement estimer les coûts générés par l’absence d’investissement dans le bien-être !

Par exemple, si le cadre de travail n’est pas agréable, combien de collaborateurs risquent de partir pile à l’heure, et être moins engagés pour leurs projets? Combien vont opter sur le home office régulier, dont on ne pourra pas contrôler la performance et la productivité? Enfin, il faut qu’on se le dise : le mal être au travail se propage comme une trainée de poudre, et un collaborateur malheureux ou contraint pourra en entraîner plus d’un dans son sillage.

Autre exemple : si une entreprise est contre le home office, mais ne propose pas non plus d’aide aux collaborateurs parents pour trouver un mode de garde pour leurs enfants, comment peut-elle espérer de ses collaborateurs qu’ils restent travailler après 17h30? L’employeur doit contribuer au bien-être de ses collaborateurs, et ce bien-être passe aussi par un bon équilibre de vie, et une bonne organisation.

Enfin, et ce sera le dernier exemple : combien d’argent faut-il dépenser pour engager les meilleurs chasseurs de tête pour attirer les talents les plus convoités? Des sommes énormes, sans certitude de résultats ! Alors que si l’on fait de son entreprise un endroit où les collaborateurs sont heureux, où les locaux sont agréables, où les avantages sont nombreux, les salariés vont être les premiers ambassadeurs et les premiers recruteurs, en cooptant des personnes dans leur réseau. Regardez l’exemple de Google : combien de personnes veulent y travailler « juste » parce que c’est LA boîte qui fait tout pour le bien-être des collaborateurs?

Posez-vous la question : comment pouvez-vous générer un bouche à oreille via le bien-être?

Comment peut-on mesurer le bien-être des collaborateurs de façon qualitative?

Il est vrai que s’il est quasiment impossible de calculer le ROI précis d’un investissement dans le bien-être, on peut a minima identifier des indicateurs qui prouvent que les collaborateurs sont heureux et reconnaissants (donc plus engagés, fidélisés, etc.) : les collaborateurs viennent spontanément discuter avec les Workplace Experience managers, témoignent de leur gratitude sur Slack, et répondent positivement lors du sondage annuel qui est mené à ce sujet (chez Criteo, 84% des collaborateurs qui répondaient au sondage indiquaient être très heureux – ceux qui ne répondent pas ne pensant pas qu’il s’agisse d’un sujet qui pose problème, et sont donc heureux, eux aussi).

Qui faut-il encore convaincre dans les entreprises?

L’investissement pour le bien-être au travail a encore du chemin à parcourir : s’il est de plus en plus tendance, il reste encore du monde à convaincre,  à commencer par les directeurs financiers ! Comme indiqué plus haut, les Directeurs financiers considèrent souvent que les dépenses liées au bien-être ne sont qu’un coût, et pas un investissement. Quand on demande à financer une place en crèche ou un avantage pour un collaborateur, on se voit souvent répondre qu' »on lui paie déjà un bon fixe et son bonus, ça suffit non? ». Les nouvelles générations attendent plus (ou même autre chose) qu’un salaire mirobolant, elles attendent de leur employeur qu’il soit bienveillant et qu’il accorde de l’importance à leur bien-être.

C’est pour cela qu’il est important de communiquer sur les initiatives qui existent, sur les entreprises qui sont moteurs sur ces sujets : la preuve par l’exemple est aujourd’hui la meilleure façon de convaincre les plus réticents !

Un grand merci à Alham pour cet entretien !

Astrid Henry 
Photo : les bureaux de Booking à Mexico City, par Office Lovin

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